LA PÊCHE RÉGÉNÉRATIVE : VERS UNE AQUACULTURE INTÉGRÉE AUX ÉCOSYSTÈMES

Dans cette conférence enregistrée en amont de Biomimexpo à Marseille, Jérémy Dumont de Nous Sommes vivants explore les pratiques de régénération en aquaculture qui visent à contribuer activement à la santé de l’environnement, à l’amélioration de la biodiversité, à l’amélioration de la qualité de l’eau et à l’augmentation de la résilience des écosystèmes marins avec les deux fondateurs de Paysan Marin, Tristan Macquet et Benjamin Denjean. Voir le replay video

Selon le WWF, il est urgent d’agir sans quoi nos océans seront bientôt décimés et des millions d’individus se retrouveront sans moyens de subsistance. source

La consommation de poisson a explosé en un demi-siècle, ce qui pose aujourd’hui un réel problème quant à la surpêche de nombreuses espèces qui, désormais, sont menacées de disparition. En 1960, un individu consommait 9,9 kg de poisson en moyenne par an là où nous avoisinons aujourd’hui les 20 kg par an. Près du double ! Pour satisfaire cette demande grandissante, les pêcheurs, toujours plus nombreux, doivent prélever davantage de poissons quitte à épuiser les stocks de certaines espèces.

A l’heure actuelle, 90% des stocks de poissons sont victimes de surpêche. Nous en pêchons davantage que ce que l’océan peut nous en offrir : cette activité n’est donc pas durable et risque de mettre en péril bon nombre d’espèces.

En parallèle, les activités de pêcherie ou en lien avec la pêche représentent, pour 800 millions d’êtres humains, la première source de revenus. Cela est particulièrement vrai pour les pays en développement d’où proviennent 61% des poissons et des produits issus de la mer consommés dans le monde. Si toutes les ressources sont tournées vers l’export, les habitants de ces pays voient leur nourriture disparaître et leur espoir de percevoir un revenu stable s’envoler.

La pêche durable labellisée MSC Marine Stewardship Council c’est près de 20% des captures mondiales et près d’un quart des captures françaises de poisson sauvage.

Le logo MSC avec le petit poisson bleu identifie les poissons et fruits de mer qui proviennent de pêcheries durables et est traçable tout au long de la chaîne d’approvisionnement. MSC est le programme de certification mondial le plus strict en matière de pêche durable. Cette organisation à but non lucratif œuvre depuis près de 25 ans en faveur de l’utilisation durable des stocks de poissons et de la protection des écosystèmes marins. source

Mais selon l’association BLOOM les pires méthodes de pêche au monde sont toutes certifiées par ce label comme par exemple le chalutage de fond — comparé à une « coupe à blanc des forêts » — qui utilise un engin qui racle les fonds marins et pulvérise la vie marine qui se trouve sur son chemin lors de la capture des poissons et des crustacés. Ce type de pêche est parfois réalisé à plus de 1000 mètres de profondeur, mettant en péril des poissons vivant jusqu’à 150 ans et ne se reproduisant pas avant 30 ou 40 ans. Et ce label ne tient pas compte des violations de droits humains, pourtant répandues dans l’industrie de la pêche et de la transformation des produits de la mer, en particulier du thon. source

Une autre option responsable réside dans l’aquaculture labélisée via l’Aquaculture Stewardship Council qui certifie une pisciculture responsable pour 40 % du saumon vendu dans le monde

Le label ASC identifie les poissons et les fruits de mer qui proviennent d’une aquaculture responsable sur le plan environnemental et social et dont la traçabilité est claire. Les pisciculteurs ASC protègent l’environnement, garantissent la bonne qualité de l’eau et la santé des poissons, et veillent à ce que l’alimentation ne contribue pas à la surpêche. Ils garantissent également des conditions de travail sûres et équitables et tiennent compte des droits et des besoins des communautés locales. source

Mais l’une des problématiques majeures soulevées par Seaspiracy concerne l’alimentation des poissons d’élevage. Certaines espèces carnivores (comme le saumon) ont besoin de protéines d’origine marine, et la pêche minotière, utilisée pour produire la farine qui va ensuite alimenter les fermes d’élevage de saumon représente 20% des prises mondiales (anchois, sardine….). De plus, selon le CIWF le label ne fixe, pour l’instant, aucune règle en matière de densité des élevages ou de méthode d’abattage. source

L’équivalent de l’agroécologie, c’est la pêchécologie, une approche intégrée des poissons / mollusques et des écosystèmes marins qui les abritent, exploités commercialement par les humains.

Didier Gascuel à l’origine de ce concept, nous montre qu’une autre pêche est possible pour le bien-être des sociétés humaines sur le long terme. Une pêche respectueuse de la nature, qui tend vers « la cueillette des plus beaux fruits dans le jardin d’Eden ». Aux yeux de l’auteur, elle est aussi une pêche au service des sociétés humaines et des territoires côtiers, une pêche qui cherche en permanence à maximiser l’utilité économique et sociale de chacun des poissons que la nature peut nous fournir durablement.

Son livre propose des solutions concrètes et des méthodes de transition. Il identifie finalement 32 critères pour une pêche vraiment durable. Economie circulaire, bien-être animal, lien au territoire, rémunération, respects des avis scientifiques… Une boite à idées pour penser les priorités au cas par cas et faire muter le système pêche.

Ainsi l’aquaculture régénérative apparait comme une piste pour que ces « jardiniers de la mer » agissent en faveur du milieu marin, garantissent la bonne qualité de l’eau et la santé des poissons, et veillent à ce que l’alimentation issue de la mer soit saine pour les humains (tout en étant économiquement viable).

Les pratiques de régénération en aquaculture visent à contribuer activement à la santé de l’environnement, à l’amélioration de la biodiversité, à l’amélioration de la qualité de l’eau et à l’augmentation de la résilience des écosystèmes marins. Cette approche comprend des pratiques où différentes espèces sont cultivées ensemble pour créer un système équilibré, comme par exemple les huîtres qui filtrent naturellement l’eau ou les algues qui abritent la biodiversité. source

L’objectif est de créer des systèmes qui non seulement produisent de la nourriture (avec une ponction raisonnable), mais qui ont également un impact positif sur l’environnement marin au bénéfice d’autres espèces que celles qui sont élevées. L’élevage fonctionne en multi valorisation – mollusques, poissons, algues – dont la vente assure un revenu diversifié aux populations locales de pêcheurs ainsi convertis en « jardiniers de la mer » qui cultivent un écosystème en soutenabilité forte sur le long terme. 

Voici quelques éléments qui caractérisent l’aquaculture régénérative selon Coolbluefuture :

  • Culture en milieu aquatique. La culture régénératrice se pratique en milieu aquatique, où les cultures sont suspendues sans être en contact avec le fond marin. Cela signifie que les écosystèmes marins ne sont pas perturbés et que la qualité des récoltes est bien supérieure.
  • Culture multitrophique. Au lieu de cultiver une seule espèce, plusieurs espèces sont cultivées ensemble. Par exemple, les algues et les moules peuvent être cultivées sur la même zone : les algues absorbent les excès de nutriments et réduisent l’eutrophisation, tandis que les moules filtrent l’eau et en améliorent la qualité.
  • Culture sans intrants. L’aquaculture régénératrice ne nécessite ni aliment, ni engrais, ni pesticides. Cela réduit considérablement l’impact environnemental par rapport aux méthodes d’aquaculture traditionnelles, où l’alimentation est souvent source de pollution.
  • Des modèles économiques plus robustes qui augmentent la création de valeur locale et contribuent à sécuriser l’emploi local et donc l’avenir de nos communautés côtières en intégrant : valorisation intégrale (peau, graisse…), activités de transformation et activités périphériques comme l’éducation et le tourisme régénératif.

Des exemples inspirants dans le monde montrent que cette aquaculture régénérative est possible. Lire notre veille « regenerative ocean farming »

Par exemple Coast 4C développe la culture d’algues via les solutions basées sur la nature, en restaurant les habitats marins, en séquestrant le carbone et en fournissant des sources de revenus durables aux pêcheurs côtiers. En étroite collaboration avec les communautés côtières marginalisées, Coast 4C vise à renforcer leur gestion responsable des ressources côtières, en s’appuyant sur des connaissances écologiques locales uniques pour contribuer à la protection et à la restauration des écosystèmes côtiers.

L’impact final peut être régénératif : surfaces d’algues en hausse, plus de biodiversité, alimentation humaine saine. Pour Coast 4C, une relation véritablement régénératrice existe entre les populations et l’océan qui implique que les communautés côtières soient habilitées à agir en tant que gardiennes responsables de leur environnement marin, en protégeant au moins 30 % de leurs eaux côtières afin de reconstituer les stocks de poissons et de restaurer les habitats côtiers tels que les mangroves, les herbiers et les récifs coralliens, tout en soutenant des économies côtières prospères et résilientes. —Nicholas Hill, PhD, Co-founder & CEO, Coast 4C

En France, ARPROE (Action pour la Régénération en Plongée des Récifs d’Ostrea Edulis) est une association loi 1901 dédiée à la préservation des océans à travers la régénération des récifs d’huîtres plates, une espèce inscrite sur la liste OSPAR comme étant en risque d’extinction par manque d’habitat. source

Leur action s’articule autour de trois vagues stratégiques : la régénération de récifs d’huîtres plates catalyseurs de biodiversité, l’information et la formation pour impliquer le plus grand nombre, et le développement d’une pêche ostréicole durable en plongée, alliant impact environnemental positif et création d’emplois locaux.

Par exemple dans l’archipel de Houat-Hoëdic ils ambitionnent de créer une véritable « ceinture bleue » de récifs d’huîtres plates autour de l’archipel. La force du projet réside dans l’engagement des acteurs locaux dans cette démarche de régénération de la biodiversité marine. Les marins-pêcheurs de l’île, riches de leur connaissance intime de ces eaux, participent activement au comité scientifique et technique local, apportant leur expertise précieuse pour la sélection des sites les plus propices. Élus, habitants et professionnels de la mer forment ainsi une communauté soudée autour d’un projet fédérateur qui valorise leur patrimoine naturel tout en préparant l’avenir écologique et économique de leur territoire.

Le Paysan Marin oeuvre à promouvoir le développement de l’aquaculture régénératrice et de la restauration active de biodiversité marine sur les côtes françaises.

Le Paysan Marin est une association ​dédiée à l’étude, à la promotion, à ​l’accompagnement et à la mise en ​œuvre de pratiques aquacoles ​régénératrices. Le Paysan Marin promeut, accompagne, développe et finance des fermes marines régénératives. Il aide les exploitants à valoriser leurs fermes pour les transmettre : en diminuant la barrière d’achat par l’investissement citoyen, et en diversifiant leurs revenus par la culture multitrophique et l’attribution de crédit environnementaux, au lieu de réinvestir dans des outils de production non adaptable aux changement climatiques et aux évolutions de la consommation.

«  Le slogan du Paysan Marin est « Régénerer nos mers, Cultiver l’avenir”. Nous sommes passionnés par la ​création d’un avenir durable pour ​notre planète en favorisant des ​approches respectueuses de ​l’environnement dans le domaine ​de l’aquaculture.  » – Tristan Macquet, Co-fondateur et Vice Président. En savoir plus

Nous vous proposons de réinventer la bouillabaisse dans la Ville de Marseille dans le cadre de Biomimexpo.

Ensemble réinventons la bouillabaisse dans la Ville de Marseille, mais il va falloir tout réinventer, l’agriculture et la pêche aussi, pour régénérer le monde et le futur ! Mais nous allons le faire en collages avec la fresque des imaginaires.

Pour cela, rendez-vous exceptionnel le 📌 28 octobre à 15h50 au Palais du Pharo à Marseille pour la 9ème édition de Biomimexpo avec la fresque des imaginaires.

La fresque des imaginaires c’est un atelier réflexif qui permet d’ouvrir de nouvelles perspectives pour son territoire, son entreprise, sa marque et ses produits. Les contenus imaginaires influencent les modes de vie, donnent du sens à nos actions et incitent à l’adoption de nouveaux comportements. En savoir plus sur la fresque des imaginaires

Lors de cet atelier participatif et créatif d’une heure extrait de l’expérience complète de trois heures, vous serez invités à réaliser des collages en piochant des visuels dans des magazines à représenter vos imaginaires, pour 𝗶𝗺𝗮𝗴𝗶𝗻𝗲𝗿 𝗲𝗻𝘀𝗲𝗺𝗯𝗹𝗲 𝗹𝗮 𝗽𝗲̂𝗰𝗵𝗲 𝗿𝗲́𝗴𝗲́𝗻𝗲́𝗿𝗮𝘁𝗶𝘃𝗲 𝗲𝗻 𝟮𝟬𝟱𝟬 dans une reconnexion à la nature qui se traduirait par des impacts contributifs sur la biodiversité et la santé !

📖 Tout le programme des ateliers et fresques : https://lnkd.in/dXCskzK7
🎟️ Votre billet pour Biomim’expo : https://lnkd.in/d9tmaCuV

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