utilisation de l’intelligence et de la créativité collective

Un très intéressant papier de Charles Leadbetter dans le Times
revient sur l’impact social d’Internet. Avec une thèse centrale : les
grandes réussites du Net, de Google à YouTube en passant par Wikipédia,
valident un nouveau modèle de business, qui ne repose plus sur un
management vertical, mais sur l’utilisation de l’intelligence et de la
créativité collectives, rassemblées autour d’un mode collaboratif.

Le
succès de Google repose sur sa capacité technique à ordonner
l’intelligence collective des internautes : c’est le nombre de liens
crées par les internautes vers une page qui détermine son degré de
pertinence. Le lien équivaut alors à un vote qui confirme l’intérêt de
la page comme réponse à la question.
Le succès de YouTube repose lui
sur une idée simple : donner la capacité aux amateurs et professionnels
de la vidéo la possibilité d’héberger gratuitement en ligne et de
partager leurs contenus vidéo. Et c’est le public qui vote pour ce
qu’il aime. Raison pour laquelle on voit davantage (pour l’instant…)
d’inconnus que de stars sur le site. Du statut de spectateur,
l’individu peut passer facilement à celui de producteur ou participant.
Le succès de Wikipédia repose sur la mobilisation structurée des compétences des internautes sur tous les domaines possibles.
Bref,
la plupart des grandes réussites culturelles et économiques du web
(sans parler de Linux, de la création du mp3…) reposent sur un modèle
collaboratif.
D’après l’auteur, nous entrons donc dans l’ère du We-Think.
Le
développement de nouveaux modes de création et d’innovation passe par
des phénomènes de masse. La masse se structure par elle-même et ne
dépend plus d’organisations verticales et de hiérarchies peuplées de
gens « qui savent » pour les autres…
Le succès de Second Life
confirme cette tendance : 95% du contenu du jeu est créé par les
résidents. Il ne s’agit plus d’entrer dans un monde déjà fini, mais de
participer à une nouvelle ruée vers l’Ouest, virtuelle certes, mais qui
démontre chaque jour un peu plus son influence croissante sur la
réalité.
D’une production de masse pour une consommation de masse,
où les travailleurs de semaine se transforment en consommateurs le
weekend, on est passé à une toute autre attitude, privilégiant la
créativité personnelle : il s’agit dorénavant d’être l’acteur de ses
actions, d’être une voix – rendue audible par les nouvelles
technologies – dans les conversations.
De ne plus être seulement un
consommateur, mais un participant (qui accessoirement consomme aussi,
mais cela change tout pour les communications de marques…).
Hier,
l’innovation et la créativité dépendaient d’élites ; la création allait
de haut en bas via des médias qui transformaient l’individu en
spectateur passif du « c’est ça ou rien ».
Aujourd’hui, les processus de création et d’innovation deviennent accessibles au plus grand nombre (voir le bouquin d’Eric Le Boucher, De la culture en Amérique, qui met en avant une certaine forme démocratique d’accès et de pratiques culturelles).
Dans
un monde devenu totalement marchand et vénal, où plus grand-chose ne se
fait gratuitement (malheureusement), ces changements auront des
conséquences croissantes sur nos modes de consommation.
Le
consommateur n’attend plus d’être « traité comme un roi » et de se voir
offrir un choix toujours plus exponentiel. Non, aujourd’hui, il
souhaite davantage être entendu, écouté.
Et oui, aussi incroyable
que cela puisse paraître, le consommateur peut aussi vouloir consacrer
une part de son temps et de son imagination à essayer de réfléchir à
des produits, de partager des idées, des améliorations…
Dans une
société de consommation de masse qui montre de façon toujours plus
criante ses limites et impacts négatifs sur notre environnement de vie,
cet irrésistible attrait pour le mode collaboratif va forcément rentrer
en conflit croissant avec le système économique des grandes
entreprises. Linux contre Microsoft, YouTube contre les traditionnels
médias de l’image. Avis aux marques malignes…

http://lexeul.blogspot.com/ 

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