Comment
concilier grands principes ergonomiques et usages quotidiens de
millions d’internautes dans les solutions logicielles destinées aux
professionnels ? Une approche de l’ergonomie Web 2.0 appliquée aux
applicatifs de CRM…
En lisant différentes contributions sur l’ergonomie Web apparues à
l’occasion du buzz permanent sur le Web 2.0, j’ai voulu à mon tour
apporter une modeste contribution à ce sujet aussi inépuisable que
fondamental : l’ergonomie logicielle.
L’ergonomie, quelle ergonomie ?
Renseignements
pris, issue du grec "Ergon" travail et "Nomos" règles, l’ergonomie
c’est l’art de concevoir des systèmes utilisables par le plus grand
nombre et présentant le meilleur compromis confort – sécurité –
efficacité.
Rien à voir donc avec des systèmes grands publics
dont les boutons démarrer servent aussi à arrêter l’ordinateur et où 3
niveaux de sous-menus sont nécessaires pour arriver à une simple case à
cocher incompréhensible sans le recours à l’aide, elle-même accessible
après encore deux autres clics et une recherche. A défaut d’avoir
compris quelque chose, nous voilà au moins prévenus !
Rien à
voir non plus avec la beauté. On se laisse souvent abuser, tous autant
que nous sommes par un écran esthétique que nous qualifions à tort
d’ergonomique. Prenons un exemple : tous les logiciels d’analyse
proposent des histogrammes ou camemberts en 3D parce que c’est beau.
Tous les utilisateurs un peu sérieux utilisent les représentations 2D
parce que c’est bien plus lisible et plus précis.
La beauté fait
vendre mais elle est parfois l’opposé du confort, de la sécurité et de
l’efficacité. Pour vous en convaincre, demandez aux femmes qui portent
des talons !
Un logiciel ergonomique est donc celui qui optimise
4 paramètres aussi importants que souvent antagonistes : confort,
efficacité, simplicité et sécurité.
L’ergonomie, pour quoi faire ?
Dans
un projet de CRM plus que dans tout autre, la préoccupation ergonomique
doit être au centre des débats. Cela pour plusieurs raisons qui font la
particularité et la difficulté (et le charme parfois) du CRM.
Certaines sont liées à la nature de l’information manipulée qui est :
• Périssable :
L’effectif
ou le CA d’un client seront peut-être justes dans les semaines qui
suivent leur mise à jour dans la base mais plus le temps passe, plus
ils deviennent faux. A chaque donnée d’une base CRM il faut définir une
date de péremption sous peine de donner le même poids à une information
d’il y a 3 ans et à une autre d’hier matin. Comment dans ces conditions
bâtir un système prédictif cohérent ?
• Approximative :
Quand
on parle de projets détectés, de date de signature, de comptes-rendus
de rendez-vous, ce sont autant d’à-peu-près qui doivent néanmoins
permettre de construire un outil de pilotage de l’entreprise fiable. Il
ne faut pas lutter contre ces imprécisions naturelles sous peine de
produire une imprécision plus grande encore. Il s’agit surtout d’en
obtenir le meilleur rendement.
Exemple : si pour décrire la
fonction d’un interlocuteur dans une base CRM, vous proposez à
l’utilisateur de choisir parmi 10 options possibles vous pouvez
légitimement penser que le résultat sera moins précis que si
l’utilisateur dispose de 30 alternatives. Erreur ! Dans le second cas,
bien souvent, il mettra n’importe quoi. On a mesuré que la qualité de
l’information baisse très sensiblement aux alentours d’une vingtaine
d’options;
• Peu contrôlable :
Lorsqu’un
utilisateur renseigne son CRM en écrivant que le client n’a pas de
projet pour l’an prochain. Est-ce vrai ? Et si c’est faux, l’erreur
est-elle consciente ?
Monsieur DupontT a été positionné
"Responsable Informatique". Est-ce bien ça ? N’est ce pas plutôt
"Directeur Informatique" ? Et quelle est en fait la différence ?
L’information est peu contrôlable, il faut la fiabiliser.
D’autres sont liées aux utilisateurs et aux types d’usage :
• Périmètre & Fréquence :
Certains
utilisateurs dans les call-center utilisent peu d’écrans du logiciel
mais les utilisent avec une fréquence élevée. Pour eux, l’ergonomie
c’est pouvoir passer très vite d’un écran à l’autre, de pouvoir
utiliser massivement le clavier et les touches de raccourcis. D’autres
ont une utilisation plus large du système et en même temps moins
répétitive. Ils privilégieront les aides en ligne, les écrans nombreux
avec peu d’information par écran, les assistants en ligne, les accès à
la souris.
• Processus "humains" :
La règle veut
qu’avant de faire une proposition à un client on ait détecté une
opportunité, que cette opportunité réponde à un besoin qui est lui-même
l’évolution d’une attente issue de la stratégie du client. La règle le
veut… Mais parfois le client veut une proposition pour un produit ou
service. Maintenant. Va-t-on imposer à l’utilisateur de l’application
CRM de passer son client à la question ? Doit-on pour autant le laisser
faire sans vérifier certains points clés du processus ?
Le
facteur humain est essentiel dans les processus clients qui sont des
processus éminemment interruptifs sans cadre administratif ou légal.
L’ergonomie, comment faire ?
Pour construire un système logiciel CRM véritablement ergonomique, il convient d’aborder le sujet sur les 3 axes suivants :
• Le "quoi" :
Les
données, l’information manipulée, les objets (client, activité,
opportunité, ..) et les champs (nom, prénom, fonction, ..). Le logiciel
ergonomique est celui qui présente les informations utiles et seulement
celles-là, qui sait mettre à jour automatiquement ce qui peut l’être et
suggérer des réponses plausibles, celui qui utilise le contexte;
• Le "comment" :
Comment
ces informations apparaissent-elles à l’écran. Laquelle est en bas, en
haut ? en gros ? en rouge ? Le logiciel ergonomique est celui qui
s’attache aussi à la présentation des informations et permet à
l’utilisateur de passer du papier au clavier sans bouleverser son
organisation, celui qui utilise le même vocabulaire que l’utilisateur;
• Le "pourquoi" :
On
n’utilise pas un logiciel de CRM pour le plaisir mais pour effectuer
des tâches précises. Comment les processus en place dans l’entreprise
se traduisent-ils dans le logiciel ? Le logiciel ergonomique est celui
qui offre une navigation et des menus directement issus de
l’organisation. Celui qui guide sans contraindre, celui qui suggère
sans interdire.
Bien entendu ces 3 dimensions ne doivent pas
s’envisager comme un paradigme unique qui vaudrait pour l’ensemble des
utilisateurs. Au contraire, elles doivent être déclinées pour chaque
profil d’utilisateur. Le directeur marketing ne fait pas la même chose
que le télévendeur. Pourquoi la fiche client se présenterait-elle de la
même façon pour ces deux profils ? Pourquoi les menus seraient-ils les
mêmes ?
Ainsi, par exemple, chez un client et pour les délégués
commerciaux, les traditionnels menus du CRM ont été remplacés par
"début de semaine", "début de journée", "avant un rdv", "après un rdv",
… Dans chaque sous menu figure, la liste des tâches à accomplir dans
ce cadre. Les assistantes commerciales ont d’autres menus. En fonction
du contexte, certaines zones sont modifiables ou automatiquement
calculées. Chacun y trouve confort, efficacité et sécurité.
Ergonomie quoi …
Vers une ergonomie 2.0 ?
Le
Web a énormément apporté à l’ergonomie des logiciels. L’application la
plus utilisée au monde est sans conteste le navigateur et chacun
maîtrise aujourd’hui les liens hypertextes. Pour autant, doit-on se
contenter d’appliquer systématiquement les mêmes recettes ergonomiques
? Les nouveaux usages du Web qui sont une réalité pour des millions
d’internautes à travers la mise en place des technologies du Web 2.0
doivent aussi nous pousser à nous renouveler et à innover pour explorer
des principes ergonomiques encore inédits.
Gageons que demain,
de nouvelles interfaces homme-machine nous permettrons de discuter avec
notre CRM aussi simplement qu’avec nos collaborateurs.

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