Design de services : le design invisible, vu sur Newzy


 Design de services : le design invisible

iPhone, iPod, Wii, Vélib’ : qu’y a-t-il de commun entre ces objets ?
Une prise en mains rapide et une grande facilité d’utilisation. 

 

Tentons une définition : le design de services, ce serait la fusion du
design d’un objet (matériel) et de son interface (immatérielle).
Historiquement, le premier à avoir approché ce concept est certainement
Apple, avec ses appareils nomades.
Concrètement, le design de services part de l’utilisateur : on
simplifie les messages, on améliore « l’expérience ». Précisément, on
suit son cheminement, sa logique en tant qu’usager, on dompte la
technologie au profit de cette expérience. Son accès aux services est
facilité et rendu désirable.
Les spécialistes parlent donc aujourd’hui de design expérentiel. Le
rapport à l’objet n’est pas pour autant intellectualisé, « au contraire
il est pragmatique pour l’utilisateur », rassure Clément Bataille,
designer et directeur design à l’Explocentre Orange Labs.
Le designer de services se penche sur l’interface, la navigation, la
relation de service entre l’usager et le produit. Il a « une démarche
méthodologique, holistique (globale) qui aborde un sujet sous l’angle
du service à rendre, sans présager du résultat », poursuit le designer.
En forçant le trait, on pourrait tenter une comparaison entre Bill
Gates-Windows et Steve Jobs-Apple : l’objectif du premier est de donner
le maximum de fonctions. Le second, lui, pose le problème en se
demandant : qu’est-ce qui sert à l’utilisateur ?
Il y a donc des objets sympathiques (pas forcément agréables
d’ailleurs), et des machines empathiques, devinant nos actes, nos
réactions, les anticipant…

PRINCIPE DE PLAISIR

Dans l’avenir numérique, déjà bien entamé, il y aura plus de plaisir
dans l’accès aux services, avec une technologie transparente, et la
question sera définitivement non pas : comment ça marche ?, mais :
comment j’accède aux services ? Tout le monde (en tout cas les moins
jeunes) se souvient des modes d’emploi, souvent traduits
approximativement et abscons, qu’il fallait déchiffrer des heures
entières pour faire fonctionner (ou non !) un magnétoscope, un
portable, un PC…
Fini tout ça ! Presque plus de mode d’emploi : avec l’iPhone, l’iPod ou la Wii, tout est intuitif ! Démonstration.

L’iphone d’Apple propose de multiples services (mail, Internet, carte
et plan, agenda, téléphone…) tous accessibles par des interfaces
intuitives. Par exemple pour faire défiler ses photos ou les visualiser
dans un format différent, l’utilisateur feuillette avec son doigt
l’écran tactile, ou retourne simplement le téléphone : des gestes
naturels et intuitifs possibles grâce à une interface privilégiant une
approche « expérentielle ». Le téléphone n’est plus doté de touches de
fonctions ni de fastidieux menus déroulants.

L’ipoD, lui, comporte finalement peu d’innovations technologiques. Le
design est minimaliste, sa valeur vient des services, d’un côté le
baladeur, de l’autre le site Internet, iTunes, Music Store : le
matériel et l’immatériel. « On est maintenant dans Internet, le
problème est la “peau”, l’interface, précise Anne-Marie Sargueil,
présidente de l’Institut français du design, c’est notre relation avec
l’interface, l’ergonomie cognitive, qu’interroge le designer de
services. » Ces services se regroupent, s’amplifient et s’améliorent –
enhance – en anglais, avec une dimension de plaisir. On pense global, à
l’expérience du client. La touche d’innovation n’est plus à proprement
parler technologique.

LA WII, console de jeux de Nintendo, est un autre exemple convaincant :
l’expérience n’est plus uniquement visuelle, comme dans les autres jeux
pour qui le réalisme des images est l’argument. Les décors (court de
tennis, green de golf, ring de boxe, piste de bowling…) sont
représentés sur l’écran d’une façon très naïve, « basique ». Ce qui
fait le succès de la Wii, c’est encore l’expérience, ce qu’on « re-sent
». Le joueur n’a pas le bras bloqué sur sa console, il joue vraiment
avec une raquette, un club de golf. Les concepteurs ont mis le son et
les vibrations, non pas dans l’écran ou à côté, mais dans la
télécommande (la Wiimote), comme dans la réalité… La Wii Fit va encore
plus loin en tenant compte des mensurations du joueur. « Surtout, grâce
à la Wii Fit, on se transforme, on éduque, le produit final, c’est nous
!, exlique François Humbert, jeune ingénieur passé à l’Institut
français du design et à la Carnegie Mellon University de Pittsburgh. Ce
que prédit d’ailleurs la section Design de services de l’université,
après le service, c’est l’étape de la transformation. »

LE VELIB’ a reçu deux prix du design, rien que ça : le Janus des
services, un prix décerné par l’Institut français du design, et une
Étoile du design français attribué par l’APCI (l’Agence pour la
promotion de la création industrielle) pour sa borne libre-service.
C’est une autre acception du design de services, moins récente – la
location ne date pas d’hier ! –, mais fondée également sur la logique
de l’usager, son expérience.
On n’achète, ni ne loue, plus son vélo, on paye pour l’usage, limité
dans le temps, d’un moyen de transport disponible à toute heure là où
on en a besoin. Et les informations sont accessibles sur Internet. «
C’est la dimension systémique, on a imaginé un système et pas un
produit, explique Dominique Sciamma, directeur du département Systèmes
et produits interactifs au Strate Collège Designers. Auparavant, pour
imager, le designer réfléchissait à la forme de la tasse à café, son
ergonomie, aujourd’hui il réfléchit à la manière dont on boit le café…
».
Avec le Vélib’, la notion de propriété s’amenuise. Ce n’est plus le
fait de posséder son propre vélo, ou bientôt sa voiture, qui est
important, c’est l’usage qu’on en fait, l’expérience que l’on vit. On
pourrait imaginer d’autres objets de la vie quotidienne qui seraient «
partagés », grâce à un accès simplifié et payant bien sûr. Ainsi, le
design de services développe non seulement de nouveaux concepts liés
aux besoins sociaux et aux changements économiques, mais modifie
l’objet lui-même, le domestique. Et nous libère de sa
tutelle.       

Source : Newzy.fr
Publié par : Nicolas Marronnier
Publié sur : le vide poches / expression

                             

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