Alexis Bernard (SNCF) : « sur Facebook, il faut savoir donner une véritable plus-value aux internautes »

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http://mobiliteurbaine.wordpress.com/2011/03/30/alexis-bernard-sncf-sur-facebook-il-faut-savoir-donner-une-veritable-plus-value-aux-internautes/

Mobilité urbaine lance une série d’interviews consacrée aux stratégies communautaires des grands acteurs du transport français. Alexis Bernard, responsable du pôle communautés 2.0. au sein de la direction de la communication de la SNCF, a pris le temps de répondre à toutes mes questions et je l’en remercie chaleureusement.

Interview #1 – Partie 1 sur 2

Bonjour à tous, je suis Alexis Bernard, responsable du pôle communautés 2.0. au sein de la direction de la communication SNCF. Mes missions comprennent la gestion des plateformes communautaires SNCF : Opinions et Débats et SNCF AppliLab, qui ont deux vocations assez différentes. Je suis également en charge de la stratégie communautaire, 2.0., au niveau de l’image. Mon équipe et moi travaillons quasi exclusivement sur l’image en ligne et l’e-reputation.

> Le nombre de pages dédiées à la SNCF sur Facebook peut donner le tournis : comment réagissez-vous à ce flux, et notamment aux pages et commentaires belliqueux ?

Il y a plus de 500 pages et groupes consacrés à la SNCF sur Facebook. En moyenne, peu dépasse les 1000 membres. Certains ont pris une certaine ampleur : certaines sont assez belliqueuses. D’autres sont plus sur le ton de l’humour : la voix d’Homer dans les gares par exemple possède deux pages (300 000 et 150 000 fans respectifs). Deux remarques donc : à une époque, le service juridique pouvait intervenir auprès des groupes et pages dénigrant l’entreprise, le logo, l’url ou encore les marques déposées. Aujourd’hui, ce n’est plus LA réponse : le juridique intervient en dernier recours. On essaye de contacter chaque administrateur, de voir ce que l’on peut faire avec eux. Chacun est libre de dire et de penser ce qu’il veut. Je suis dans une philosophie assez libérale à ce sujet. En revanche, détourner un logo relève de la propriété intellectuelle et est soumis à des lois. Le détournement d’une de nos marques nous pose toujours problème, c’est évident. On essaye de trouver un compromis avec les intéressés et en général, cela se passe plutôt bien. Attaquer légalement un groupe lui fait finalement de la publicité gratuite. Et puis supprimer un groupe ne mène pas forcément à grand chose car ils peuvent revenir sous une autre forme. Notre but est de convaincre et cela prend du temps. Notre terrain d’action est le dialogue.
Autre mission importante : créer du bruit positif. C’est ce que fait très bien Voyages-SNCF.com, avec notamment Yaëlle et son fil Twitter et les équipes qui ont mené à bien pas mal d’opérations. C’est ce qu’a fait SNCF Intercités avec le film sur le festival de Deauville. Il est évident que cette communication intelligente n’empêche pas les retards ou les problèmes subis par les clients au quotidien. Ca permet de contrebalancer cet « over-bruit » médiatique, qui n’est pas toujours fondé. Il n’est pas infondé mais parfois beaucoup trop médiatisé.
Au fond, les groupes et pages qui marchent le mieux sont celles qui utilisent l’humour car il y a quelque-chose derrière. Un groupe anti-SNCF ou anti-quelque chose finalement s’avère être assez creux : ça n’avance à rien, il n’y a pas de débats. Le seul point de contact, c’est le côté « anti-SNCF ». Alors que sur la page dédiée à Homer, les échanges sont assez sympas. Quand on a découvert ces pages courant 2009, on a décidé de jouer le jeu. Ce sont des démarches que nous aimerions davantage faire et davantage médiatiser. A l’époque, on a assez peu communiqué dessus, mais c’était une super opé et on a bien ri, ce qui est plutôt sympa quand on bosse. Les retombées ont été bonnes. Insuffler du positif et montrer que la SNCF n’est pas que pannes et retards. C’est aussi un dialogue, une écoute. Nous ne sommes pas hermétiques à ce que nous disent nos clients et c’est cela que l’on veut montrer par là. Notre communication accompagne les efforts faits sur le terrain.

> Vous êtes très actifs et utilisez tous les média et réseaux à disposition et ce, de manière pertinente.

Comme beaucoup d’entreprises, on tâtonne. D’autant que nous sommes une entreprise assez complexe, à plusieurs étages. Dans la communication, nous avons plusieurs entités et chacune s’est lancée là-dedans. On essaye d’être cohérent et ça l’est de plus en plus aujourd’hui. On a lancé différentes plateformes, on a pensé à Facebook, à Twitter, comme tout le monde. On est ni meilleur, ni pire que les autres. Ce n’est pas parce qu’on ne l’a pas fait qu’il n’y a pas eu de réflexion en amont. Par exemple, nous ne sommes pas présents en tant qu’entreprise SNCF sur Facebook parce que, pour moi, quand on va sur Facebook, il faut pouvoir donner une plus-value aux internautes. Faire de la conversation sur ce réseau social, ce n’est pas forcément pertinent. Il y a plein d’autres choses à y faire et on y est présent d’une autre manière, sur des produits, sur des opérations, sur des évènements. SNCF La Radio, par exemple, qui donne de l’info trafic en temps réel, est présente. Dans ce cas précis, il y a une vraie plus-value à utiliser Facebook car on donne quelque-chose. Si on va sur ces réseaux pour parler de nous ou pour s’auto-congratuler, ça n’intéressera pas grand-monde.

Twitter, en revanche, est beaucoup plus intéressant, d’une manière globale. Utiliser l’instantanéité et la rapidité du réseau permet de diffuser de l’information, notamment l’info trafic aux voyageurs. En temps de crise, c’est quelque-chose de précieux. D’autres entreprises le font déjà très bien, nous aimerions le développer de manière plus importante : 2011 devrait être l’année pour implémenter tout ça.
Donc ça a beaucoup foisonné ces dernières années, on essaye de rationnaliser, de donner de la cohérence. Ca commence à bien fonctionner. Pareil sur le mobile : des applications comme SNCF Direct ou VSC Compagnon (Voyages-sncf.com) sont sorties. Il y a eu un réel enthousiasme de la part d’une entreprise de mobilité comme la SNCF. Forcément, le mobile est l’outil idéal. Aujourd’hui, c’est une de nos priorités. Nous cherchons donc à créer une cohérence entre toutes ces applications afin d’aboutir à une suite servicielle complète, qui pourra couvrir l’avant-voyage, le pendant et l’après. C’est vraiment le partage d’informations qui prédomine. Prenons un exemple avec SNCF Direct, qui pourrait permettre, pourquoi pas, d’indiquer à ces potes dans quelle voiture l’on se trouve. On invente en permanence : il faut savoir prioriser, tout en restant sur notre fil conducteur.

> Je rebondis sur Twitter : l’initiative personnelle d’un contrôleur du réseau Paris Nord (Mikaël, que vous pouvez suivre sur @SNCF_), s’est mué en initiative professionnelle de qualité. Est ce qu’au fond, chaque opérationnel de la SNCF n’est pas en quelque-sorte community manager ?

C’est une vraie question et quand je suis rentré dans l’entreprise il y a trois ans, j’ai été surpris par l’affect qu’il pouvait y avoir entre les cheminots et la SNCF. Je n’ai pas vu ça ailleurs. Deuxième chose : il y a beaucoup d’initiatives en ligne. Sur Opinions & Débats, ils sont une dizaine à aider, à répondre aux clients, sans jamais s’énerver. A rentrer parfois dans le débat, mais jamais dans la polémique. Chaque intervenant a son expertise métier et se présente en tant qu’agent de l’entreprise et pas pour autant comme la voix de la SNCF. Nous, de notre côté, cela nous convient très bien. On salue leur travail quotidien, qui n’est pas évident. Mikaël, qui gère le compte Twitter @SNCF_, répond chaque jour à un nombre considérable de questions. Et il n’y a pas que lui. Par exemple, Marc, qui est contrôleur à Strasbourg et beaucoup d’autres. Ils ont une capacité de travail phénoménale. On les rencontre et pensons à leur donner un outil de travail commun. Pour autant, on ne veut pas les « récupérer » non plus. J’estime qu’ils font ça bénévolement et je suis pas là pour alourdir leurs missions quotidiennes. L’idée est de les faire se rencontrer afin qu’ils soient plus efficaces. C’est très positif en tout cas. Est ce que chaque agent est community manager ? Je n’en sais rien (sourire), je ne pense pas non plus, mais en tout cas, il n’y en a pas énormément et c’est d’autant plus difficile qu’ils le sont dans le réel ;)

La deuxième partie de l’entretien paraîtra en fin de semaine.

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