Vive la création de valeur actionnariale

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La main invisible du marché, par Bertrand Jacquillat

Bertrand JacquillatDes
voix de plus en plus nombreuses s’élèvent, et au sein même des
entreprises, pour critiquer l’objectif, encore naguère sacro-saint, de
création de valeur actionnariale, sans doute la théorie du management la
plus influente des trois dernières décennies, selon laquelle
l’objectif des dirigeants d’entreprise devraient être la maximisation de
la valeur actionnariale.

Certes, ce culte a eu des effets pervers, et notamment par ses
implications sur les rémunérations des dirigeants liées aux cours
boursiers, qui ont pris diverses formes : la manipulation des états
comptables et des cours boursiers, le court-termisme des dirigeants
consistant à couper dans les dépenses d’investissement, de recherche et
développement, de publicité pour embellir les bénéfices à court terme au
détriment de la prospérité économique de long terme.

Les critiques ont trouvé un large écho au Peter Drucker Forum, la
réunion annuelle de management qui s’est tenue à la mi-novembre à
Vienne, patrie d’origine du théoricien du management. John Kay, un
économiste anglais, éditorialiste du Financial Times, a dénoncé le
court- termisme des dirigeants d’entreprises anglaises, dans un rapport
que lui avait commandé le gouvernement de David Cameron. Et puis le
court-termisme s’est étendu aux investisseurs dont la durée de détention
moyenne des actions qui était de plusieurs années il y a encore
cinquante ans n’est plus aujourd’hui que de quelques mois.

Mais attention ! Beaucoup d’entreprises ont eu une carrière boursière
fulgurante sans pour autant obérer leur succès à long terme, pensez à
Amazon qui réinvestit tous ses profits pour dominer un jour la
distribution mondiale, ou Microsoft, Google et autres Apple qui ont
attendu des années, voire des dizaines d’années, avant de distribuer des
dividendes. Et puis ses détracteurs sont bien flous quant aux critères
qui pourraient remplacer la valeur actionnariale.

Au lieu de jeter le bébé avec l’eau du bain, mieux vaut conserver
l’objectif, après tout le cours d’un titre est une mesure externe
objective sur laquelle les dirigeants peuvent être jugés, en le
modifiant légèrement pour éradiquer la tentation du court-termisme :
refuser d’offrir une guidance des bénéfices aux investisseurs, comme le
recommande Warren Buffett et comme le font de plus en plus de sociétés,
donner un bonus aux actionnaires qui gardent longtemps leur titres (Air
Liquide et L’Oréal), faire dépendre les rémunérations variables des
dirigeants des performances spécifiques de l’entreprise et non d’une
conjoncture boursière générale, interdire aux dirigeants qui exercent
leur options ou à qui sont attribuées des actions gratuites de les
vendre avant leur départ en retraite. Et éviter que la fiscalité ne
vienne prélever toutes ces constructions intelligentes…

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