Camper et Fanta ont choisi
d’arborer leurs couleurs dans les stations de métro. Une démonstration
de la montée en puissance des supports hors média.
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| A la station de métro Saint-Paul, des personnages ludiques, respectant les codes visuels de la campagne de la marque Camper, étaient représentés grandeur nature. |
C’est une
publicité un peu particulière qui a dû surprendre plus d’un usager des
métros parisiens, courant septembre. Les stations de métro Saint-Paul,
sur la ligne 1, et Rome, sur la ligne 3, ont « customisé » leurs quais
des couleurs de deux annonceurs, Camper et Fanta .
Une révolution
? Pas tout à fait. La RATP ouvre depuis cinq ans cet espace
publicitaire – les murs entiers de quais de métro – aux annonceurs, à
condition de ne pas dépasser une quinzaine de jours. Métrobus (filiale
de Publicis), la régie publicitaire de la RATP, commercialise alors
l’espace aux agences d’achat d’espaces des annonceurs. Les frais
techniques de l’opération sont à la charge de ces derniers, qui se
voient également imposer une charte esthétique. Et la démarche gagne du
terrain : « Nous proposons aux entreprises de réaliser une
opération événementielle qui s’ajoute à un plan médias classique, avec
une campagne d’affichage dans les couloirs de métro. Cela leur offre
plus de visibilité auprès des usagers, de manière originale »,
explique Gérard Unger, président de Métrobus. La démarche intervient
souvent en complément d’un plan médias classique, incluant par exemple
une campagne d’affichage, voire des opérations de street-marketing. Au
printemps 2007, avant la Fête des mères, Kenzo s’est ainsi affiché en
grand à la station Concorde, distribuant en parallèle des échantillons
de parfum aux passants.
Faire du spectacle
Pour
les marques, l’enjeu est de taille, puisque s’offre à elles
l’opportunité de décliner leur campagne de manière spectaculaire, en
réinjectant leurs codes et en métamorphosant la station de métro en un
véritable décor à leurs couleurs. Au point que l’opération peut devenir
la pièce maîtresse d’une campagne pour une marque en quête de
notoriété. A ce titre, le cas du chausseur espagnol Camper est
exemplaire. Née en 1975, cette entreprise moyenne (180 millions d’euros
de chiffre d’affaires en 2006) n’affichait jusqu’ici qu’une présence
discrète en France, avec une dizaine de boutiques depuis 1992, contre
220 dans le monde. Mais l’arrivée d’un nouveau directeur artistique en
début d’année, Phil McAveety, issu de Nike, s’est traduite par un
virage radical pour la marque, déterminée à se démarquer face à des
concurrents tels que Kickers. « Nous voulions obtenir plus de
visibilité, avec une campagne de publicité très visible, qui nous
permette de montrer nos produits », résume Philippe Salva,
porte-parole de Camper. En septembre, Camper s’est donc approprié la
station de métro Saint-Paul, proche de sa boutique, dans le Marais. Des
personnages ludiques, respectant les codes visuels de sa campagne
actuelle, étaient représentés grandeur nature avec quelques modèles de
chaussures, et un slogan, « Imagination walks » (l’imagination
en marche). Conseillée par l’agence Starcom Partenariat (groupe
Publicis), le chausseur espagnol a mis les moyens, investissant 100.000
euros d’achat d’espaces, et près de 90.000 euros en frais techniques,
pour recouvrir les murs des quais du métro d’un film plastique.
Artillerie lourde
Du côté de Fanta, l’ambition consistait, là encore, à « renforcer la marque et à lui redonner de la visibilité », précise Véronique Bourez, directrice marketing de Coca-Cola France, qui se félicite « d’avoir pu disposer d’une grande surface d’expression pour faire preuve de créativité ».
Un élément clef, puisque Fanta, quatrième plus grosse marque de son
portefeuille, souhaitait atteindre le public-cible de la marque, les
adolescents, grands utilisateurs de transports en commun. La marque a
fait revêtir par Ogilvy, durant quinze jours, les murs de la station
Rome. Avec un graphisme percutant : autour du slogan « Libère ton imagination », figuraient des bouteilles Fanta géantes, des bulles orangées et des personnages semblant tout droit issus d’un jeu vidéo.
Surtout,
les marques ont misé sur la complémentarité entre ce support
événementiel, et d’autres supports publicitaires plus ou moins
traditionnels. Pour Fanta, l’opération s’est accompagnée, dans le cadre
de sa campagne actuelle, par des pubs télévisées et de l’affichage,
ainsi qu’un nouveau site Internet lancé en avril. Camper a également
sorti l’artillerie lourde, avec un budget global de 4 millions d’euros
: quatre bus à impériale sillonnaient les rues de la capitale. A
l’étranger, le chausseur espagnol a déployé de massives campagnes
d’affichage dans les métros de Londres, Rome, Madrid, Berlin, Munich,
et sur les tramways à Milan et Barcelone. Enfin, la marque est allée
encore plus loin en utilisant un dispositif « outdoor » en vogue, des
bâches à ses couleurs, tendues sur des lieux emblématiques : au
Printemps Haussmann à Paris, et sur des places à Rome, Madrid, Berlin
et New York. Premier bilan : avec les murs des quais de métro, les
marques sont assurées de se faire remarquer par les personnes attendant
sur les quais. Mais ce constat va de pair avec un principe de
précaution : « Il faut créer la surprise, de manière ponctuelle, rester dans l’événementiel, et ne pas multiplier les opérations de ce type », estime Antoine Ballif, en charge du budget de Fanta chez Ogilvy.
Rupture
A
l’arrivée, cette série d’initiatives offre une consécration
supplémentaire aux supports publicitaires hors média, caractérisés par
l’irruption permanente de nouveaux formats : cabines d’essayage en
grands magasins, gobelets de café en entreprises, cartons à pizzas, et
même toilettes de bars branchés. « Les annonceurs veulent jouer sur la rupture, en proposant des publicités ludiques dans des lieux inattendus »,
analyse Stéphane Marrapodi, président de l’Association des supports et
médias tactiques. Preuve que les choses bougent, depuis le 1er octobre,
les annonceurs peuvent figurer sur des bâches recouvrant des monuments
historiques en travaux, mais « à condition que les marques participent aux travaux de ravalement, et que la publicité n’occupe que 50 % de la bâche »,
précise Stéphane Dottelonde, président de l’Union de la publicité
extérieure (UPE). Avec ces supports hors médias, la publicité
accompagne donc les consommateurs dans leurs divers univers de vie au
quotidien. Au risque de devenir toujours plus intrusive ? C’était, très
probablement, l’une des craintes du Conseil de Paris, dont le projet de
règlement de la publicité à Paris, restreindra l’affichage.


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